En descendant la rue de la Mare, Henriette Bagès remonte le cours du temps, le cours de sa vie et le cours l’histoire. L’été se termine et la voilà de retour sur ce petit bout de terroir parisien qui l’a vue naître en 1934. Depuis 2004, ce coin-là s’appelle la place Henri-Krasucki. Nommée en hommage à l’ancien résistant et membre du Parti communiste devenu secrétaire général de la Confédération générale du travail, né juif en Pologne, comme les deux parents de madame Bagès, et mort en 2003.
Enfant, après que sa famille a immigré en France, Henri Krasucki a habité sur ce carrefour. Plus que des territoires, les quartiers de la capitale sont des idées, des imaginaires, des récits, des mémoires. Du temps de l’enfance d’Henriette, dont le nom était alors Mandelcwajg, la petite place n’était qu’un carrefour anonyme d’un faubourg ouvrier coincé entre cinq rues aux façades noircies. Il flotte désormais quelque part entre les quartiers en perpétuel embourgeoisement de Belleville, Ménilmontant et Jourdain, dans les 19e et 20e arrondissements de Paris (...)