Bellevilloise : « Non, nous n’avons pas "repris" La Miroiterie »

Streetpress

Publié le mercredi 12 juillet 2017

StreetPress a publié la tribune de l’un de ceux qui a ouvert le squat libertaire « La Miroiterie ». Il y critiquait la « reprise » en main du lieu par La Bellevilloise. Ils nous ont demandé un droit de réponse, afin d’expliquer un peu mieux leur projet.

Vous avez publié une tribune sur les relations entre La Bellevilloise et le site du 88 rue de Ménilmontant [anciennement occupé par « La Miroiterie »], qui comporte de nombreuses erreurs et contre-vérités.

Relire la tribune de Michel Ktu : « La Bellevilloise reprend le squat La Miroiterie pour inviter des artistes de merde et c’est dégueulasse ».

Nous n’entrons pas dans une polémique à propos des questions de typologie de projet, de qualité des contenus et d’artistes, de publics concernés, car c’est insultant pour ces derniers, libres de leurs choix, tout comme chacun(e) est libre d’exprimer ce qui lui importe quant à l’évolution d’espaces qui ont marqué la ville. C’est la nature même d’un territoire que de muter, et de ceux qui en sont les acteurs de le faire vivre, d’y apporter la part de ce qu’ils sont, de leurs savoir-faire, et d’y partager ce qui leur tient à cœur. Celle liberté ne peut par définition « plaire » de façon égale à tout le monde.

Nous souhaitons rectifier les informations erronées suivantes :

1 – La Bellevilloise n’a pas « repris » la miroiterie

La miroiterie n’était pas à prendre ni à reprendre. Le site n’a pas pu être conservé (nous le regrettons) compte tenu de son état de délabrement et de danger. La Bellevilloise est un établissement indépendant dont la position est constante depuis 2000 (date de son entrée dans ses locaux actuels) à propos de ce site : solidaire du maintien d’une vie accessible aux parisiens au cœur de cet ilot historique (c’est en ce sens qu’elle a toujours manifesté sa bienveillance à la démarche créative que le squat a pu impulser) ; disposée à aider et contribuer tant que faire ce peut à la préservation de cet ensemble architectural singulier et bucolique qui « entre » au cœur d’une zone densément habitée ; elle n’en serait pas l’exploitante, ayant déjà fort à faire avec son activité engagée et intense.

La Bellevilloise n’a pas racheté ce site et à fortiori pas engendré sa démolition, comme l’ambiguïté du texte peut parfois le laisser supposer.

2 – Notre intervention a permis de stopper l’opération de promotion immobilière

Les équipes de La Bellevilloise, par leur vigilance et leurs arguments, ont permis que l’opération de promotion immobilière sur ce site, très dense (logements « remplissant » toute la parcelle et bouchant l’ouverture depuis la rue), non ouverte aux publics, portée par un acteur immobilier qui a racheté un à un les lots de co-propriété, soit stoppée juste à temps au profit d’une alternative qui puisse fédérer de nouvelles envies et poursuivre l’activité sur ce site.

Suite à cela un accord a pu être trouvé entre ce marchand de biens et la Ville pour que la collectivité puisse reprendre le terrain et porter un projet économe qui permette à cette portion de territoire de demeurer créative et ouverte à des usages variés. Ce n’est peut être pas « l’idéal » décrété par certains mais c’est une réalité qui laisse place à des activités de création, de rencontre, portées par des acteurs indépendants. Soulignons aussi que cette initiative témoigne de la capacité d’acteurs très différents (collectivités, indépendants privés, artistes …) à avoir su s’unir pour faire qu’à Paris des sites vivants, effervescents, ne soient pas irrémédiablement condamnés à un stricte usage de densification immobilière.

Nous précisons que cette démarche a généré la suspension de l’expulsion du squat pendant un temps. Cela a ouvert à ses occupants la possibilité de proposer un projet de réaffectation du site. Cela n’a pas été leur choix, ce qui peut se comprendre puisqu’un squat est usuellement une activité d’un temps éphémère plus ou moins long, qui explore de façon alternative un champ de créativité, de vivre ensemble, mais ne trouve pas forcément suite à son sens dans un schéma de structuration plus contraint.

3 – Il n’y aura pas de salle de concert du nom de « La Miroiterie »

Nous avons suivi avec attention le projet, avons été contributifs et pouvons assurer que :

Les espaces projetés sur cette parcelle sont prévus pour être exploités par des acteurs divers et indépendants de la collectivité, aussi bien que de l’établissement La Bellevilloise.

Il n’est pas prévu de salle de 300 places et encore moins du nom de « La Miroiterie ». Mais une fabrique autour des images et des sons, portée par des artistes, réalisateurs et techniciens, qui pourrait ponctuellement s’utiliser en espace de diffusion pour des show case ou présentations, ou plateau de travail.

Ce qui est nommé « SPA » est l’usage original d’un sous-sol en un lieu de vie atypique qui mêlera sports et arts à travers des activités calmes, autour d’un univers d’eau. C’est un projet en cours de construction, dont la tarification n’est pas définie, et qui sera le plus ouvert possible tout en apportant une proposition originale, étonnante.

4 – Il ne s’agit pas d’opérations financières

Ces projets sont des investissements conséquents pour tous ceux qui les portent ou y contribuent, ce sont des risques avant tout, pour des initiatives en quête de faisabilité, d’équilibre. En aucun cas il ne s’agit d’opérations financières. C’est même tout le contraire de cette finalité qui a pu être défendu pour permettre à l’art et l’innovation de continuer à foisonner. Mais il s’agit d’initiatives portées par des indépendants, qui sont aussi des employeurs, et ont la responsabilité de trouver une économie à leurs projets pour respecter leurs équipes, leurs fournisseurs tout autant que leurs usagers, et offrir le meilleurs possible. Générer une vie économique n’est pas une insulte à l’histoire de ce site, au contraire.

5 – Ce site mérite un projet libre, inventif et audacieux

Un peu d’histoire aide la diversité des points de vue et sans doute leur justesse :
Le squat de « La miroiterie » fût une des étapes de vie – foisonnante et vivifiante – de ce site à partir des années 2000, portée par plusieurs personnes. Cette ancienne cité artisanale a accueilli dans son passé d’autres vies créatives non moins respectables et stimulantes, assurément fondatrices, portées par la famille Pipart qui depuis 1837 à initié un pôle en perpétuelle évolution, tour à tour lieu de rencontre, d’activités artisanales et d’esprit, fédérant des artistes comme Jacques Prévert, Willy Ronis, Boris Vian…

C’est en 1979 que naît l’activité industrielle « miroiterie Bosh » dont l’activité a malheureusement périclité avant que ce site ne soit réveillé par quelques agitateurs qui ont su en faire un lieu chaleureux et artistique.

Cette étape doit-elle dicter qu’après presque deux siècles de vie mêlée entre artisanat, idées et création, ce lieu iconique devrait aujourd’hui terminer sa course et toute possibilité de renouveau englouti par la fin de sa dernière vie ?

Nous ne pensons pas qu’un tel déluge soit inéluctable. Le 88 Ménilmontant mérite mieux que de finir d’une aussi minable façon, dans des simulacres de mauvaises intentions que, justement, il a su ne jamais laisser l’écarter de son esprit libre, inventif et audacieux grâce à la ferveur de toutes celles et ceux qui ont su le faire vibrer, avec générosité. Il n’est nul besoin d’une guéguerre autour d’affabulations mystérieuses pour justifier tout ce que ce site a pu générer de rencontres, et risquer d’en ternir la vitalité.

Nous préférons à cela un imaginaire en perpétuel mouvement !

Source : https://www.streetpress.com/sujet/1...

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