« Je me souviens d’un coin perdu »
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Comment rendre compte d’un quartier perdu dont il ne reste à peu près rien ? Ce n’est pas simplement le travail du temps, de la vie qui est passée, ce n’est pas seulement le cours des ans qui bouleverse toute chose, c’est qu’il a été massacré. Pas de bombardement, mais la restructuration de Paris à la fin des années 50.
Chaque samedi, en partenariat avec le Pavillon de l’Arsenal, Libération accueille sur son site l’un des épisodes du « Grand Paris des écrivains ».
Ce coin de Belleville-Ménilmontant entre la rue Julien-Lacroix et la rue des Couronnes, entre la rue de Ménilmontant et la rue de la Mare, devint sous la plume des technocrates du temps et des démolisseurs, l’ïlot insalubre numéro 7.
Nous habitions au 18, passage Ronce. Ne le cherchez pas en vous promenant dans le quartier, ou en scrutant un plan du XXe arrondissement, même son tracé n’existe plus. On peut voir sur un mur adjacent à l’école de garçons de la rue Julien-Lacroix, une tache un peu plus claire que l’ensemble de la paroi.
C’est la trace de la plaque qui annonçait le passage.
- Rues de la mare et des couronnes en 1947
A droite du passage, s’ouvrait la cour où nous habitions et au milieu de laquelle poussait un figuier qui s’efforçait de survivre. Un vieil Algérien en prenait soin, lui parlait et le protégeait.
Au fond, une dizaine d’appartements en deux escaliers. En face, quand on traversait la rue des Couronnes, on se trouvait devant le grand escalier qui, à travers le boisé où fut tourné Casque d’or, menait vers la rue du Transvaal et la rue des Envierges, d’où l’on avait une des plus belles vues de Paris.
Le dernier plan de Un homme qui dort d’après le roman de Georges Perec s’y arrête. Là s’ouvraient les escaliers de la rue Vilin chère à l’écrivain, et le passage Julien-Lacroix où nous nous sommes cachés pendant la guerre. Tout cela a été emporté pour faire place au parc de Belleville…
Quand on remontait la rue Julien-Lacroix jusqu’à la grande église, s’ouvrait la rue Etienne-Dolet, où se trouvait l’école des filles et tout près de la place qui ne s’appelait pas encore place Maurice-Chevalier, une confiserie où l’on allait acheter des réglisses et des roudoudous. La tenancière avait de la sympathie pour moi et m’appelait « la petite survivante ».
Tout cela peut paraître nostalgique, lointain. Ces lendemains de la guerre portaient notre espérance et dans ce quartier considéré comme un taudis, insalubre, à démolir, nous réapprenions à vivre et nous étions heureux.
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